Elle est nominée pour le Grand prix du chef de l’Etat, pour les Arts et les Lettres, aux côtés de Baba Maal, Amadou Sobel Diop, Ousmane Williams Mbaye, Assy Dieng. Une distinction qui fait rêver et qui sans doute, fait monter d’un cran, l’abnégation dans le travail.
14h41, la sonnerie de son téléphone retentit. Au bout du fil, la chaleureuse voix d’une dame fait grésiller le fil. C’est avec un sentiment jovial palpable, répondant du tic au tac, de façon spontanée, que la nominée du prix se prête à nos interrogations.
Stéphanie Yandé, c’est d’abord l’histoire d’une enfant férue de la nature, d’une jeune fille rêvant de faire carrière dans la mode, et d’une styliste accomplie. Cela fait sept ans qu’elle s’est lancée dans le stylisme. L’on le sait, il fait partie de la liste des métiers qui requièrent passion, abnégation, et ténacité dont a fait preuve Stéphanie.
Vous nous direz sans doute que c’est le lot courant de toutes les professions. Seulement, il faut reconnaitre que le stylisme au Sénégal rencontre pas mal de difficultés. Entre ceux qui excellent, recherchant l’innovation, ceux qui copient, et les tailleurs qui leur font de l’ombre, le stylisme est sur le pont des entraves.
Sa passion pour la mode est le fruit de son amour pour l’art, la nature. Ce qui laisse échapper un côté romantique, un pan de sa personnalité.
Jetons un œil dans le rétroviseur du passé de Stéphanie, son cursus scolaire.
Elle a effectué un cursus normal. Seulement, c’est en troisième secondaire que sa passion pour le stylisme est dévoilée au grand jour. Stéphanie a voulu tout arrêté afin de s’y consacrer. Sans doute que la flamme brûlait intensément. Elle s’est heurtée au refus des parents qui ont opposés un véto. Ce qui n’est pas surprenant. D’ailleurs, certains penseront que ce n’est pas une information tellement il est devenu récurrent. En bonne fille, elle a continué ses études pour faire plaisir aux parents alors que dans son cœur de jeune fille, son amour pour le stylisme la consumait. « Ma maman a insisté pour que je poursuive jusqu’en Terminale. C’était tout ce que j’attendais, dit-elle. Après cela, je me suis lancée dans le stylisme, » raconte-t-elle.
Prenant enfin la voie qui la mène à son rêve et à sa réalisation, Stéphanie étudie au complexe sadia, avant de rejoindre l’institut de coupe couture et modélisme (ICCM). C’est dans ce temple du savoir de la mode qu’elle est sortie major de sa promotion avec deux diplômes, BTS et BT en poche.
Une manière de prouver et de se prouver que son rêve deviendra réalité.
Parler de soi n’est pas si aisée qu’on ne le croit. C’est sans doute la raison pour laquelle la styliste a été assez hésitante pour parler de ses qualités morales. « Que dire de moi, dit-elle, je suis une personne sereine, zen, naturelle, » lâche-t-elle en éclatant de rire. Son parcours professionnel laisse filtrer deux qualités : la ténacité et la persévérance.
Toujours dans l’exercice de la mode, Stéphanie donne des cours de stylisme dans des écoles privées mais, cette fois, c’est pour combler le vide de sa profession. « Je suis styliste costumière. J’aime faire des choses qui sortent de l’ordinaire. C’est un choix. Mes créations ne sont pas portables. Et vous savez mieux que moi qu’au Sénégal, les habits non portables n’ont pas la côte qu’ils ont en Europe. C’est pour cette raison que j’enseigne ce que j’exerce, » explique-t-elle.
Aujourd’hui, Stéphanie a créé sa marque qui, en dépit du fait qu’elle signifie « beauté en sérère, porte le nom de sa grand-mère, Mossane ». Sa nomination, est pour elle une satisfaction immensurable mais, plus un mérite. « Maintenant je peux me considérer comme faisant partie de la cour des grands, dit-elle, une certaine émotion dans la voix. Je me dis que c’est mon cadeau, ma récompense pour toutes ces années de labeur. »
A les voir, l’on dirait que les créations de la styliste racontent chacune une histoire, qu’elles sont l’expression de la culture ainsi que de la beauté de la mixité qui, est devenue le style de vie de nombreuses personnes à travers le monde.
Rappelons que depuis 2012, le Grand Prix du Chef de l’Etat des arts et des Lettres n’a pas été décerné. Or, cette reconnaissance est sans doute, de ces choses qui animent la personne d’un certain sentiment de motivation, qui renforce l’engouement dans le travail, et fait naître la volonté de faire mieux, de donner le meilleur de soi. Tel un petit frère qui voit son grand-frère recevoir son diplôme.