Les acteurs de la pêche alertent sur la très grande fragilité du secteur et indexent les mauvaises pratiques de la pêche des grands bateaux étrangers en particulier qui font des ravages au large des eaux territoriales sénégalaises. Selon un rapport publié en 2022, du département américain de l’Agriculture, « la pêche contribue à 3,2% du produit intérieur brut et 10,2% des exportations du Sénégal ».
« Sauver la Mer et la Pêche », des acteurs de la pêche au Sénégal se sont prononcés à travers un point de presse sur les mauvaises pratiques, les licences de Pêche mais aussi des perturbations climatiques. Ils l’ont fait savoir dimanche lors de la rencontre organisée par Mbacké Seck, président de l’organisation dénommée « Code écologique », ont alerté une nouvelle fois les acteurs de la pêche lors d’un point de presse.
« La pêche est impactée par trois éléments, en premier les licences de pêche. Nous avons presque 200 unités pour la pêche industrielle. Cette pêche concerne généralement les thonidés et les sardinelles. Les thons qui migrent depuis l’Afrique du Sud et le Brésil qui passent par le Sénégal en un temps T. Nous avons beaucoup de chalutiers qui font cette pêche. Le deuxième élément qui détruit nos pêches halieutiques, c’est une mauvaise pratique de pêche juvénile, vendue aux Burkinabés ou aux navires espagnols. Le troisième élément, ce sont les changements climatiques. Ce que la mer devient plus chaude ou plus froide ou plus salée. Les poissons qui ont besoin d’une température ambiante à un moment donné, vont ailleurs. Ils n’ont plus besoin de venir ici maintenant. Nous avons compris que 40 % de notre poisson vient de l’exportation pour un pays qui en exportait. Donc, pour me résumer, nous avons trois éléments qui contribuent ensemble, en même temps à la baisse de nos stocks halieutiques : c’est les mauvaises pratiques de pêches, les licences de pêche, mais aussi les dérèglements climatiques. C’est pourquoi nous avons lancé cette campagne Sauver la mer, mais aussi nous allons parler aux décideurs et aux assureurs », a fait savoir Mbacké Seck.
Poursuivant son propos, le président de l’organisation « Code écologique » informe : « Avec 718 km de côtes réparties en 3 parties (la Grande Côte de Saint Louis à Yoff, la Petite Côte située au Sud de Dakar entre Yoff et Saloum, et la Basse Casamance), le littoral sénégalais, est caractérisé par une diversité des écosystèmes et des ressources comprenant des mangroves, des lagunes, des estuaires marécageuses et des plages sablonneuses. Du point de vue géomorphologique, on distingue des côtes sableuses sur 300 km, des côtes de mangroves sur 234 km et quelque 174 km de côtes rocheuses. Les activités économiques, de tourisme et de pêche y sont très importantes. La pêche, avec plus 400 000 tonnes de produits halieutiques, et la création de 650 000 emplois et sur la sécurité alimentaire (75 % des protéines animales). Par ailleurs, il note qu’aujourd’hui, « le matériel et les engins utilisés pour la pêche tels que la senne coulissante ou scène tournante, le filet maillant dérivant, les filets dormants, les lignes pirogues glacières, les moteurs de plus en plus puissants, entraînent une surexploitation des espèces et une baisse des tonnages débarqués ».
Il note par ailleurs, des mesures conservatoires pour le secteur prises sur 5 axes. Évoquant le tourisme balnéaire (Saint Louis, Dakar, Thiès, Petite Cote, Fatick, Delta du Saloum et Ziguinchor, il précise que cela « représente plus de la moitié de l’offre touristique du Sénégal qui est la seconde source de devise du pays (Banque Mondial 2018). Après des décennies de recherches, le Sénégal vient de découvrir d’importantes réserves de gaz et de pétrole. Dans un souci d’une meilleure.
Selon un rapport publié en début octobre par la Fondation pour la justice environnementale (EJF), « près de deux-tiers des pêcheurs au Sénégal affirment gagner moins qu’il y a cinq ans, une conséquence des « pratiques non-durables » et « destructrices de l’environnement » des chalutiers de fond », selon le document de la Fondation pour la justice environnementale (EJF).
« 65% des pêcheurs interrogés par EJF (acronyme anglais de la Fondation pour la justice environnementale) ont déclaré gagner moins aujourd’hui qu’il y a cinq ans », affirme le rapport de cette organisation écologique basée à Londres.
« Au-delà des pertes de revenus, les communautés de pêche artisanale voient leurs conditions de vie se détériorer ». Par exemple, « 88% des pêcheurs, 93% des transformatrices et 100% des mareyeurs ont déclaré avoir un accès plus limité au poisson pour leur propre consommation », ajoute le document.
Le rapport s’appuie essentiellement sur des entretiens menés au Sénégal avec ces communautés entre septembre 2022 et mai 2023. Il met à l’index les chalutiers de fond dans la crise de la pêche au Sénégal.
« Les pratiques de pêche destructrices de l’environnement et non durables pratiquées par la flotte chalutière aggravent la crise du secteur de la pêche artisanale. (Les) pêcheurs artisans ont vu le volume de leurs captures diminuer considérablement et sont contraints de rivaliser » avec ces bateaux « pour des ressources qui s’amenuisent », dit ce rapport.
**En outre, les pêcheurs artisans sont confrontés aux « incursions illégales » de ces navires « dans la zone réservée à la pêche artisanale », une situation qui entraîne « la destruction fréquente des engins de pêche ».**76% des pêcheurs ont vu leurs filets ou leurs lignes endommagés par un chalutier, selon le rapport.
Les chalutiers de fond au Sénégal sont essentiellement contrôlés par des acteurs étrangers de l’Union européenne et de Chine, explique l’ONG.
Ils « approvisionnent presque exclusivement les marchés étrangers, principalement ceux de pays de l’UE. Pendant ce temps, de nombreux foyers sénégalais peinent à s’approvisionner en poisson sur les marchés locaux pour leur consommation personnelle ».
En raison notamment de la baisse de « leurs revenus, un nombre croissant » de pêcheurs « sont contraints d’émigrer à l’étranger », en Europe notamment, dans des pays comme l’Espagne où des arrivées de centaines de migrants sénégalais ont été observées ces dernières semaines.