Elles viennent en tenue traditionnelle certes. En robe, taille-basse, ou autre modèle. Mais, elles trouvent toujours le moyen de l’approprier à leur goût.
L’on dit souvent que notre façon de nous vêtir, laisse entrevoir un pan de notre personnalité. Seulement, il y a autant d’occasions, que de façon de s’habiller.
Celles qui ne l’ont pas compris en ont payé le prix lors du Gamou à Tivaouane. Leur vêtue leur a porté un énorme préjudice. Elles n’ont pas pu accéder aux mausolées.
Elles les surnomment « soldats », à cause, disent-elles de leur comportement abusif. Ces hommes, gardiens de ces temples les dévisagent à des kilomètres, les repèrent et les sortent tantôt des rangs ou les interceptent lorsqu’elles sont sur le point d’entrer. Il arrive que leur attention soit détournée par quelque chose. Le moment où deux ou trois en profitent pour se faufiler discrètement à l’intérieur. Là-bas, surprise! Un autre agent du port vestimentaire les attend et les font extirper des lieux.
Ndoumbé Fall, la vingtaine, pensait qu’avec l’effervescence du Gamou, la population qui a afflué à Tivaouane, les gens n’auraient pas la tête à s’intéresser à ce qu’elles portent ou non. Mais, oh grande fut sa surprise!
Assise à même le sol, Ndoumbé a la tête ancrée dans ses mains. Une criante désolation se lit sur son visage. 《 L’on m’a interdite l’accès à toutes les mausolées. C’est mon premier Gamou à Tivaouane et il ne vaut pas grand chose,》dit-elle déçue. Elle se lève, l’on découvre une longue fente sur sa jupe. Que dire ?
L’affluence qu’il y avait d’habitude au mausolée de Serigne Ababacar Sy le démontre. Le rang des filles est loin d’être serrée.
Yaye Marie, Anta et Mame Fily ont été toutes trois extirpées des rangs pour mauvais comportement vestimentaire.
《L’ être que l’on célèbre, le prophète Mohamed dit-Mame Fily, celui qui nous a valu toute cette peine était l’essence même du beau. Alors l’on se doit de nous faire belle pour lui. L’on se maquille, l’on se parfume, l’on sort nos plus beaux habits, l’on met nos plus beaux atours, pour le célébrer.》 Les faux ongles et faux cils de Mame Fily s’aperçoivent à des kilomètres.
Yaye Marie porte une robe blanche, à la broderie dorée. Sa poitrine découverte, qu’elle tente de cacher par un voile quasi-transparent ne passe pas. Elle pointe un doigts accusateur sur les soi-disant « gendarmes « , gardiens de ces lieux. 《Ce qu’ils font est exagéré. Chacun ne porte que ce qu’il a. Nous n’allons pas emprunter des habits,》 crie-t-elle au bord de l’hystérie.
《Tu parles pour toi ou tu le fais pour nous toutes, à notre place,》lance-une femme, attentive à notre discussion. 《 En quoi est-ce normal de venir au Gamou avec des faux-cils et de faux-ongles, des greffage surplombant la taille. L’ on ne va pas à un baptême. Vous êtes dans l’erreur et vous pensez avoir raison, 》 tonne-t-elle en faisant une moue.
A ces mots, elle tourne les talons et rentre dans le mausolée de Serigne Ababacar Sy les laissant elles, à qui l’on a interdites l’accès à ce lieu.
Fatoumata Gueye, une sexagénaire tente d’expliquer le comportement vestimentaire de certaines filles.
《Pour dire vrai, elles n’ont plus de tenue traditionnelle correcte, dit-elle en nous le soufflant presque au creux de l’oreille. Elles s’habillent tout le temps comme si elles n’avaient pas assez de tissus. Même pour aller à des funérailles, elles ont un problème de port vestimentaire. Elles ne le font pas exprès elles n’ont pas quelque chose de particulièrement descente dans leurs armoires. Voilà leur principale problème》.
Adji Rokhaya, sa compagne parle de respect, le minimum selon elle. 《 Je les regarde ces jeunes et j’ai l’impression qu’elles ne savent pas vraiment ce qu’elles font ici et pourquoi elles sont là. Elles prennent cet évènement pour une occasion de faire des rencontres. Il y en a certaines qui, pour elles, tous les lieux sont bons pour des rencontres.》 Cette déclaration est accompagnée d’un rire général.
Ce jugement sans appel qui compare un lieu de sainteté à une place publique, est fréquemment formulé par des femmes âgées, originaires de la citée religieuse, qui ont connu les sanctuaires dans leur enfance.
《La précaution minimale pour entrer dans la pièce des saints est de se déchausser, comme on le ferait pour pénétrer dans une mosquée, mais il arrive même parfois, que cette contrainte ne soit pas respectée. Avec moi, il est hors de question de laisser passer cela,》 dit- Dabakh, un des « soldats » taxé l’Amiral par une jeune femme à qui il interdit de passer.