Adama SENE, correspondant à Saint-Louis.
A l’instar des musulmans des autres localités du pays, ceux de la région Nord, ont sacrifié dans un bel élan de mobilisation et de solidarité, la fête du « Yaoumal Achoura » ou Tamkharit. Une occasion qui consiste à se regrouper en famille pour déguster des plats de couscous, formuler des prières et faire le tour des maisons pour le « Tadjabone », qui a perdu son lustre d’antan dans la cité de Mame Coumba Bang.
Malgré la difficile conjoncture économique que vivent les populations de la vieille ville, le « Yaoumal Achoura » ou Tamkharit, a été fêté à Saint-Louis avec faste, dans le recueillement et la ferveur religieuse. Connus pour leur solidarité légendaire et leur sens du partage, les saint-louisiens ont dégusté en famille de somptueux plats de couscous à la sauce viande et d’autres bons mets savamment bien préparés. Pour respecter une recommandation prophétique, de nombreux musulmans saint-louisiens ont aussi jeuné les journées du mercredi et du jeudi, en formulant des prières pour rendre grâce à Allah, le Tout Puissant, le Miséricordieux. A en croire Imam Abdou Diagne de la mosquée de Mame Rawane Ngom de Léona, la Tamkharite est une fête particulière pour le musulman. « C’est le jour où le bon Dieu a sauvé la plupart de ses prophètes d’un péril certain. Mais également c’est un jour de tristesse avec le souvenir du massacre à Karbala d’un grand nombre de la famille du Prophète Mohammed (PSL) » a-t-il signalé. Raison pour laquelle, certains ont passé la nuit du mercredi au jeudi à faire des zikr ou à réciter le saint coran. D’autres dans leurs coins à faire des incantations avec les noms de Dieu pour bénéficier des nombreux bienfaits qu’on annonce dans le « Yaoumal Achoura ». Si les prières et la ferveur religieuse occupent une place de choix dans la célébration de la Tamkharite à Saint-Louis, le côté festif n’est pas non négligé par les jeunes. Ces derniers dans une folle ambiance, ont sillonné les différents quartiers de la ville pour le « Tadjabone », même s’il faut noter que cette manifestation culturelle a grandement perdu son lustre d’antan.
Pour certains nostalgiques, les raisons de la baisse de l’engouement sont multiples. Pour certains les temps ont changé, aujourd’hui la ville est devenue cosmopolite et l’insécurité y est grandissante. « Avant pratiquement tout le monde se connaissait dans le quartier. Et puis les gens étaient moins violents que maintenant. Chaque année, après la fête on entend toujours des cas d’agression ou de tentatives viols. C’est pourquoi, beaucoup de parents responsables ne laissent pas leurs enfants errer dans la nuit pour demander de l’aumône dans les quartiers » a expliqué Mme Ndoye née Faloly Sall. A en croire d’autres personnes du troisième âge, la crise économique et la modernité des jeunes en sont de grands facteurs de ce détournement des populations du « Tadjabone ». « Certes les familles ont mangé des plats copieux, mais il faut avouer que les moyens financiers font défaut dans de nombreuses familles sénégalaises. Pour fêter, il faut avoir l’esprit tranquille et de l’argent pour vivre. Vue les dures conditions économiques qu’ils traversent, les jeunes ados n’ont plus l’esprit à la fête. Secundo, l’aspect culturel est laissé en rade, on voit de moins en moins les jeunes se déguiser en homme ou en femme pour faire du Tadjabone, alors qu’à notre temps on rivalisait d’ingéniosité de déguisement pour marquer notre passage dans les quartiers. Malheureusement les jeunes d’aujourd’hui chantent et dansent mieux le rap ou les chansons des américains que les chants du Tadjabone. Ils sont complexés et ont tendance à se détourner de leur culture et de tout copier du toubab. Donc la suite est connue, c’est la chute vertigineuse du Tadjabone à Saint-Louis » a avancé l’ancien faux lion, le doyen Iba Ndiaye.