Le président de la République Macky Sall en appelle à la responsabilité des pays riches et pollueurs. Ils doivent apporter une contribution financière pour aider les pays pauvres à mener une politique environnementale, soutient le président sénégalais. Sinon, ce sera la « destruction certaine de la planète ». Dans un entretien avec le média français franceinfo le président en exercice de l’Union africaine appelle les pays riches faire preuve de responsabilité. Il prend part à la 27e conférence des Nations unies sur les changements climatiques, à Sharm El Sheikhen Egypte qui a démarré hier dimanche 6 novembre et ce jusqu’au 18 novembre prochain en présence de représentants d’acteurs non étatiques de l’Initiative CAP COP 27.
« Nous avons constaté que les rendez-vous n’ont pas été respectés malgré quelques efforts », pointe le président de la République du Sénégal, Macky Sall, lundi 7 novembre sur franceinfo, alors que les dirigeants du monde vont s’exprimer à Charm El-Cheikh (Égypte), pour le deuxième jour de la COP27. L’une des questions cruciales de cet événement a été rajoutée au dernier moment, le mécanisme des « pertes et dommages » : une aide financière de la part des pays riches et pollueurs, à destination de la politique environnementale des pays pauvres, peu responsables du réchauffement climatique.
franceinfo : En quoi cette COP qui se déroule en Afrique est particulière pour vous ?
Macky Sall : Nous avons constaté que les rendez-vous n’ont pas été respectés malgré quelques efforts. Depuis 2020, la communauté s’était engagée à mettre 100 milliards de dollars par an, jusqu’en 2030. On n’a pas encore les premiers 100 milliards. Alors que l’Afrique, à elle seule, a un besoin estimé par le GIEC de 85 milliards par an d’ici à 2030, pour pouvoir respecter les objectifs de réduction de la température de la planète à moins de 1,5 degré. C’est dire que le moment est venu de mettre sur la table la responsabilité de chacun et qu’elle en ait une conscience collective mondiale. Soit, nous sauvons la planète, soit elle disparaît avec nous.
L’Europe a vécu un été caniculaire, on a comparé certaines températures à celles subies en Afrique. Est-ce que ça va selon vous permettre une prise de conscience ?
Je l’espère, car nul n’est à l’abri des changements climatiques. […] Il est temps que tout le monde soit conscient. Il faut une solidarité internationale. Nous sommes obligés de nous endetter pour nous adapter, pour être dans des économies sobres en carbone. Cela n’est pas acceptable alors que nous aurions pu aller vers des solutions comme le charbon, ce qui est aujourd’hui en cours dans la plupart des pays industrialisés depuis la guerre en Ukraine. Si l’argent n’est pas là, nous allons recourir aux mêmes sources énergétiques pour les aspirations du développement de l’Afrique. Nous avons plus de 600 millions d’Africains qui n’ont pas encore accès à l’électricité. Allez dire à ces populations : ‘attendez que la transition énergétique soit faite’.
Ça fait des années que les pays riches ont le pied sur le frein sur la question du mécanisme des « pertes et dommages ». Est-ce que vous espérez les convaincre cette fois-ci ?
On va les convaincre. Je crois que si rien n’est fait, nous sortirons de Charm El-Cheikh avec un goût d’inachevé. Chacun retournera avec ses solutions nationales qui consisteront à développer par tous les moyens et quoi que cela puisse en coûter à la planète. C’est le risque. C’est non seulement au niveau des États, mais également au niveau des entreprises qui sont principalement les plus grands pollueurs. À ce niveau, je réclame une prise de conscience collective. Les Africains font des efforts.
« Au Sénégal, nous avons aujourd’hui 35% de l’électricité qui vient de sources renouvelables. Nous nous sommes endettés également pour faire des trains et des bus électriques. »
Est-ce que vous dites aussi aux pays riches, que si on ne vous aide pas, la question migratoire sera de plus en plus importante ?
C’est forcément un argument. Parce que si vous n’avez que des îlots de prospérité dans le monde, devant une écrasante majorité de pauvreté, rien ne pourra arrêter la volonté de migration. C’est un phénomène naturel. Donc, autant diversifier la prospérité dans le monde […], c’est ce qui peut fixer les gens. […] Nous ne demandons pas l’aumône, nous pensons que c’est une responsabilité partagée. Les pays qui sont, depuis plus d’un siècle, les responsables de ce réchauffement, doivent prendre conscience qu’ils doivent aussi apporter leur contribution pour que toute la planète ne suive pas le même chemin. Ce qui nous précipiterait vers une destruction certaine de la planète.
Le 6e rapport d’évaluation du Groupe intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), fait état d’un avenir inquiétant en termes d’impacts des changements climatiques pour le continent africain. Ce rapport nous rappelle que l’Afrique qui émet moins de 4 % des gaz à effet de serre de la planète, reste très fortement livré aux effets néfastes des changements climatiques. Le continent a un niveau de vulnérabilité relativement élevé, ce qui vient exacerber les problèmes que connaît le continent, notamment la pauvreté, les conflits etc. C’est pourquoi la COP 27 devrait constituer un tournant pour la mise en œuvre des décisions passées et la justice climatique.
L’un des succès de la COP 27 reposera sur la capacité des Parties à mobiliser des financements adéquats.
Les pays développés devraient montrer leur volonté de tenir leurs engagements financiers afin de renforcer l’action climatique en matière d’adaptation dans les pays en développement.
L’année 2022 a été marquée par des impacts des changements climatiques de plus en plus visibles et dévastateurs ! De l’Afrique du Sud au Nigeria les inondations ont dévasté les communautés avec un bilan lourd : plus de 300 décès au Nigeria, dépassant 400 morts en Afrique du Sud. Ces pertes et dommages font malheureusement désormais partie de la triste réalité sur le continent, et dans les pays en développement. Il est donc urgent durant la COP 27 de mettre en place un mécanisme financier adapté.
Le Chef de l’État est arrivé en début de soirée à Sharm El Cheikh (Égypte). Le Président @Macky_Sall doit prendre part à la Conférence des Nations Unies sur le changement climatique, la #COP27, dont les sessions plénières débuteront demain lundi 7 novembre 2022. pic.twitter.com/V1PCDMd73H
— Présidence Sénégal (@PR_Senegal) November 6, 2022
Le Président de la République a quitté dimanche Dakar pour prendre part à la COP27 de Sharm el Sheikh en Egypte, informe un communiqué de la présidence.
Le président Sall va prononcer un discours à la cérémonie d’ouverture, présider le panel sur l’investissement dans l’eau, co-présider avec le Premier Ministre grec un panel sur la sécurité de l’eau, deux autres avec le Président Français sur l’adaptation au changement climatique en Afrique et un autre avec Premier Ministre du gouvernement espagnol sur l’alliance pour la résilience à la sècheresse.
Selon le document, plusieurs entretiens bilatéraux sont aussi dans l’agenda du chef du Président de la République qui sera de retour à Dakar, le 08 Novembre.