L’ANC s’est chargé de négocier le départ anticipé du président sud-africain. Maintenant, le peuple s’en est mêlé. Le parti tente de convaincre Zuma de démissionner depuis plusieurs jours. Les rencontres s’enchaînent avec les cadres de l’ANC. Le président du parti Cyril Ramaphosa affirme qu’une transition a été évoquée récemment. Mais plus les tractations traînent en longueur, plus la rue sud-africaine s’impatiente.
Partira, partira pas ? La démission de Jacob Zuma est souvent annoncée comme imminente mais incessamment repoussée. Un feuilleton interminable qui fatigue Avril, une retraitée du secteur médical. « C’est à cause de toutes ses affaires. Maintenant on veut lui dire « au revoir, il est temps de partir ». Mais il est têtu, je pense qu’il ne croît pas lui-même avoir commis des erreurs. »
Au-delà de l’entêtement du Président, c’est son égoïsme assumé qui choque Queta, une responsable de réseaux sociaux de 28 ans. « Il nous a fait tellement de mal. Le pire avec Jacob Zuma, c’est que son manque intelligence est criant et qu’il est ouvertement égoïste. Il ne s’intéresse pas à l’intérêt national. »
En novembre, un sondage Ipsos indique que 72% des Sud-africains de plus de 18 ans considèrent qu’il aurait mal fait son travail. Plus grave encore, l’enquête d’opinion montre que 60% des soutiens de l’ANC sont mécontents de son mandat. Il faut dire que son palmarès est chargé. « Les gens en ont littéralement marre de Zuma. Il a plongé le pays dans la honte, il gouverne mal, il confond les deniers publics avec son propre porte-monnaie », affirme Marianne Séverin, chercheuse associée au LAM (Les Afriques dans le monde) de Sciences-Po Bordeaux et spécialiste de l’ANC.
Selon les chiffres de l’OCDE, le taux de chômage atteint des niveaux records: 27% dans l’ensemble de la population, 54% chez les 15-24 ans.
Zuma est surnommé le Président « Téflon » tant il a su s’accrocher au pouvoir par le passé, est attaqué de toutes parts pour les affaires de corruption dans lesquelles il est empêtré. Pamandla Kanbule vend des poteries dans un centre commercial de Johannesburg. Résigné, il affirme que Zuma réussira à se maintenir. « Il est encore le Président, il est encore puissant, il a encore beaucoup de soutien. Donc, pour être honnête, je pense qu’il ne partira pas. »
S’il résiste aux pressions de l’ANC, Jacob Zuma fera face à la dixième motion de défiance contre lui à la fin du mois.
L’incertitude se prolonge au sommet
Mercredi 7 février, le soufflet est redescendu d’un cran. La confusion a finalement laissé place à une nouvelle période d’attente et d’incertitude quant à l’avenir du Président Zuma.
Après le report de son discours à la nation et une rencontre apparemment « constructive » avec le président de l’ANC Cyril Ramaphosa, le chef de l’Etat semblait sur le départ mardi soir.
Pourtant, les affaires ont repris leur cours normal dès mercredi matin. Jacob Zuma a réuni son gouvernement au Cap. Une photographie, diffusée en milieu de journée le montre même tout sourire aux côtés de Cyril Ramaphosa et entouré de ses ministres.
Peu après, le président de l’ANC a publié un communiqué, pour clarifier la situation. Cyril Ramaphosa explique que des « discussions directes ont débuté » entre lui et le chef de l’État. Il prend note de « l’incertitude » et de l’inquiétude de ses concitoyens. Il assure que les Sud-africains seront informés aussi tôt que possible sur « la situation du chef de l’Etat ».
Aucun détail n’a été divulgué sur le contenu exact de ces discussions, et on ignore quand elles doivent aboutir. Mais l’agenda officiel de Jacob Zuma est en tout cas bien rempli jusqu’à la semaine prochaine.

