Mouhamed Demba Diop, ce nom fait penser à quelqu’un. L’esprit vacille un peu. Mais oui c’est le créateur de l’imprimante 3D ! Une fabrication qui a fait sortir le père de cette imprimante conçue au Sénégal de l’ombre. Ceux qui ont entendu parler de lui sans mettre un nom sur son visage, tout en pensant avoir affaire à un homme âgé, au mieux d’une trentaine d’années seront surpris, assez agréablement.
C’est un jeune à la fleur de l’âge. Un étudiant de 23 ans, en troisième année de licence en mécanique et conception industrielle.
C’est en sandale que le jeune technicien-bricoleur nous accueille. Il n’a pas la carrure d’un héros, son succès, il le doit à son esprit. Vêtu de façon simple d’une chemise bleu assorti d’un pantalon beige, Mohamed Demba se fait timide au début. A première vue, il renvoie à quelqu’un d’effacé. « Dans mon quartier à la Patte-d’oie Builders, je me fonds dans la masse, » confirme-t-il. Dans le salon où il nous fait entrer, sa mère et sa nièce, dans une vive discussion, font croire qu’il y a âme vivante dans la maison calme. Le timide se lâche au fur et à mesure que l’on avance dans la discussion.
L’imprimante 3D, l’étudiant la définit comme un réalisateur de rêves, l’association du virtuel et de la réalité. « C’est un concepteur d’objets en plastique, sous toutes les formes, que l’on ne voit rarement, explique-t-il. Il suffit d’imaginer un objet avec des formes assez particulières, télécharger un fichier pour ensuite l’imprimer. »
L’origine de l’innovation
Après la création de sa première imprimante qui lui valut cette notoriété, Mohamed Demba a entamé une autre. Comment lui est venue cette idée ? C’est sans doute ce que l’on a envie de savoir en premier. « C’était un besoin, une nécessité, dit-il. Il me fallait à tout prix des matériels en format plastique que je ne pouvais m’offrir du fait de leur cherté. Cette imprimante était la seule façon de me les procurer. Je me suis inspirée d’une vidéo sur internet pour la réaliser avec ce j’avais sous la main. Heureusement, je n’ai pas eu besoin de beaucoup d’outils. Du reste, le recyclage d’objets, la ferraille a fait le reste. Pour la deuxième, je n’avais besoin que d’une clé et d’un tournevis, » renseigne-t-il.
Comme pour dire que pour entreprendre dans le domaine de la technologie, il suffit de trouver une solution à une problématique. La recherche d’innovation peut déboucher sur une création.
La première est une structure en bois. Quatre petits moteurs la font fonctionner. Certains sont accrochés sur une planche, d’autres le sont entre elles. L’appareil est muni de rails. L’objet à imprimer est posé sur une vitre soutenue par des rails. De petits fils verts relient le système. L’appareil d’apparence banale est d’une grande utilité. Les différences entre la première et la seconde imprimante résident au niveau de la taille, et du temps d’impression. Avec l’ancienne version, pour certains objets, elle prenait trois heures. Avec la deuxième, elle se fait en moins d’une heure, avec plus de précision. La taille aussi est une des différences clés.
C’est donc en vue d’amélioration que Mohamed Demba a créé la deuxième imprimante. Il explique : « La première est entièrement constituée de bois. Or, l’imprimante fonctionne grâce à des moteurs qui émettent des vibrations. Ce qui fait qu’avec le bois, ces vibrations s’amplifient rapidement. Cet aspect se répercutait sur la qualité de l’impression qui n’était pas des mieux. »
Avez-vous reçu une quelconque aide ? « Non ! Répond-t-il. En aucune façon je n’ai reçu d’aide, ni matériel, ni financier. »
La troisième version sera peut-être commercialisée au Sénégal, d’autant plus l’expérience sera là après deux coups d’essai.
Cela suscite du plaisir d’entendre une personne parler de ce qui la passionne. A ce moment, le sentiment devient perceptible, palpable. Ce qui anime la personne se sent, se reflète à travers le gestuel, la manière dont la personne en parle. Le sourire éclairant le visage est spontané. L’on le sait, tout ce qui est spontané est enveloppé par le voile de l’authenticité. C’est ce que Mohamed Demba Diop véhicule.
L’étudiant ne compte pas faire de l’imprimante, une création imaginée sur un coup de tête. Il voit plus loin. « J’en ferai une entreprise. » Cette phrase, il l’a dit avec une détermination qui ferait plier des financeurs de projet. « Je suis en train de constituer une équipe de confectionneurs, de développeurs logiciels, d’automaticiens, afin de mettre le projet en marche, » poursuit-il. Parce que travailler tout seul ralentit le travail. » Sa jeune équipe est composée d’étudiants rêveurs de sa trempe.
L’actuelle génération est riche. Elle est riche de par la connaissance qu’elle a sous la main grâce notamment à internet. Des recherches ont permis au jeune Demba de mettre sur pied une imprimante 3D, que beaucoup ne voient que sur des bouts de papiers.
C’est sans doute grâce à ces jeunes comme Mohamed Demba que Pierre Corneille disait de façon prémonitoire que la valeur n’attend point le nombre d’années.

