Le « sothiou » peut être considéré comme la brosse à dent traditionnelle en Afrique, il est également utilisé dans d’autres régions du globe comme l’Arabie. Ce cure-dent continue à résister au temps et à l’invasion de la brosse à dent moderne et du dentifrice. Il est pour certains le garant de leur hygiène bucco-dentaire alors que d’autres lui prêtent des vertus thérapeutiques.
Avec l’éventail, le cure-dent ou « sothiou » en wolof (une langue locale trés parlée au Sénégal) faisait partie de l’arsenal de beauté des femmes d’antan. Aujourd’hui, il est utilisé par bon nombres de sénégalais pour rendre leurs dents plus éclatantes mais également pour, disent-ils, se soigner. L’utilisation de ce cure-dent traditionnel est simple, il suffit de prendre le bâtonnet puis de le mâchouiller afin de rendre plus tendre l’extrémité avec lequel les dents seront frottées.
Au marché Colobane, un jeune est assis à même le sol devant des dizaines de bâtonnets, dans un geste presque mécanique, il prend un bâtonnet puis le taille à sa guise avant de le ranger selon les variétés. Il s’appelle Boubacar Diallo, il est vendeur de cure-dents à Colobane, il a choisi ce point stratégique afin de faire miroiter son produit aux citadins qui se rendent au travail. Son rituel est parfois interrompu par des clients qui s’en procurent avant de continuer leur chemin.

« Je suis venu acheter un « sothiou » pour me curer les dents. Cependant, je sais que le neb neb (acacia nilotica ndlr) soigne beaucoup de choses même si je ne sais pas quoi exactement », affirme Modou Fall. Il glisse une pièce de 50 francs à Boubacar Diallo en contre partie des deux cure-dents qu’il vient d’acheter. « Le neb neb fait partie des variétés les plus prisées avec le habbatou sawda et le gouro (cola ndlr) qui marchent le plus », nous confie Boubacar tout en continuant de tailler les bâtonnets.
« Le gouro est plus utilisé par les femmes, d’ailleurs quand elles se curent les dents puis boivent de l’eau, elles sont très contentes », affirme Aly Ba, le sourire aux lèvres. Lui aussi est vendeurs de « sothiou » à quelques mètres de Boubacar Diallo. Il nous informe également que le habbatou Sawda est également utilisé aussi par les « ibadous » car c’était « le cure-dent du prophète de l’Islam », informe Aly Ba.
L’utilisation du cure-dent est très recommandée par le prophète Mouhammad (paix et salut sur lui). « Il y a plusieurs hadiths authentiques qui parlent des vertus du siwak (« sothiou »). On retient principalement deux vertus : l’hygiène bucco-dentaire et l’autre est d’ordre spirituel; son utilisation fait plaisir à Dieu », nous informe l’Imam Makhtar Kanté.

Au delà des vertus thérapeutiques attribuées au « sothiou », les vendeurs nous informent que certaines variétés sont des porte-bonheur ou éloignent le mauvais oeil. « Matt xewël » (bois ou bâton de la prospérité), est une variété de cure-dent qui porte bonheur à son utilisateur. Les racines du « matt xewël », plus fines sont plutôt recommandées aux élèves et aux commerçants car il porte chance. Les bâtonnets permettent de se protéger du mauvais œil.
Une croyance assez répandue et qui fait le bonheur d’Aly Ba et des siens. « Je gagne entre 4 000 et 8 000 francs par jour», informe-t-il.
Selon les dentistes, le cure-dent fortifie la gencive et arrête le saignement. Cependant, ils mettent en garde contre le frottement excessif du « sothiou » contre les dents car ceci pourrait entraîner l’érosion de l’émail dentaire.

