Sur les allées, entre les voitures, dans les marchés, les vendeurs de parapluie ont véritablement la côte en cette période d’hivernage.
La saison des pluies a commencé sur le tard à Dakar mais ces deux semaines, la capitale et plusieurs autres villes ont bien été servi. Et au moment où une bonne partie de la population croule sous les eaux, d’autres se remplissent les poches. Ne dit-on pas que le bonheur des uns fait le malheur des autres ?
A l’allée qui mène vers le rond point liberté VI, des vendeurs se posent. Les traits tirés, l’air fatigué, ils se reposent sous un arbre. D’une voix basse, Momar Mbaye Sène demande l’heure et sursaute comme s’il réalisait qu’on lui avait volé des millions. « J’ai trop dormi », lance-t-il à ses compagnons qui font mine de ne pas l’entendre. Le visage plus ouvert que les autres, Momar Mbaye nous renseigne d’emblée qu’il aurait voulu que la saison dure plus longtemps. « En temps normal, je suis vendeur de cacahuètes. Quatre ans maintenant que je me reconvertis en vendeur de parapluie durant cette courte période. Oui, dit-il la mine rehaussée d’un petit sourire, on se frotte les mains », confie-t-il ralliant le geste à la parole.
En ralliant le marché de Ouakam, l’on aperçoit des marchands ambulants se faufiler entre les voitures, l’objet des convoitises en main.
Ils viennent, les clients, et pas qu’un peu. A Ouakam, un petit tour dans le marché de la commune nous en dit long. Ahmadou Sarr, tient une place de quincaillerie juste à l’entrée. Ses yeux tout rouge traduisent un manque de sommeil manifeste. Entre deux bâillements, il étale tout : « Vous voyez, il ne me reste qu’un seul parapluie. Et ce n’est qu’avant hier que j’ai racheté un nouveau stock, dit-il pointant du doigt le parapluie de couleur marron foncé ».
Ils se font de l’argent, presque facilement. Pourtant, le prix de cet objet de protection n’est pas à la portée de tous. « Entre 2 500 et 3 000 Francs l’unité », lâche-Ahmadou Sarr. « C’est à prendre ou à laisser. Je connais la qualité des parapluies que je vends. Ce n’est pas une question d’augmenter le prix lorsque vient cette saison. Précision de taille, » dit-il, contrairement à certains de ses camarades.
Mor Bassoum, lui, avance sèchement qu’il tire plus de ces parapluies en ces temps que durant le reste de l’année. « Oui c’est comme ça, dit-il, haussant les épaules. Tout le monde fait pareil. Les taximans, les commerçants durant les fêtes, nous on ne fait que suivre », justifie-t-il. En profiter c’est tout à fait normal. La période des pluies ne dure que le temps d’une rose à Dakar alors, cela ne fait pas de mal », dit-il cru.
En creusant davantage, l’on apprend que du côté des dames, un parapluie doit être renouveler à chaque saison des pluies, même si l’ancien est en bon état. Marième Diakhaté, la trentaine, écourte son marchandage pour nous le faire savoir. « J’en rachète tous les ans. Celà ne me dérange pas. Il y a de nouveaux styles, plus de couleurs, tout ce que j’aime », dit-elle, la mise parfaite.
« C’est pour celà qu’on apprécie la coquetterie des femmes sénégalaises », nous souffle-son vendeur, le rire un peu moqueur, réussissant à lui soutirer 3 000 francs, pour un parapluie de couleur rose, parsemé de petites étoiles noires.