Le 19 octobre, l’Arabie Saoudite confirmait par le relais de la télévision publique Al Ekhbariya que le journaliste saoudien Jamal Khashoggi avait été tué au consulat d’Istanbul. Un meurtre qui fait grincer des dents jusqu’à poussé certains à dire que jamais un cas pareil n’a suscité mépris, colère et écœurement populaire. L’enfant du palais saoudien, devenu un éditorialiste insoumis, avait subitement disparu une fois entré le 2 octobre dans la représentation consulaire de son pays. Des responsables turcs ont affirmé que Khashoggi a été assassiné par une équipe d’agents venus de Ryad.
A l’instar de la communauté internationale, c’est un sentiment d’injustice que ce meurtre a provoqué chez les sénégalais. Sur les réseaux sociaux, notamment sur Twitter, ils sont nombreux à pointer du doigt Ryad et à émettre des jugements sur la manière dont est traitée cette affaire.
Ryad parle maintenant d’un meurtre prémédité
La réaction de Ryad était très attendue, au regard de la crise aiguë déclenchée par cette disparition. Après avoir nié son assassinat, les autorités saoudiennes, sous la pression internationale, avaient avancé plusieurs versions évoquant d’abord une «rixe» ayant mal tourné puis une opération «non autorisée» et dont le prince héritier Mohammed ben Salmane, considéré comme l’homme fort du royaume, n’avait «pas été informé».
Et pour la première fois, Ryad évoque un meurtre prémédité. Le procureur général d’Arabie Saoudite a déclaré ce jeudi 25 octobre que, sur la base d’informations fournies par la Turquie, les suspects accusés du meurtre du journaliste Jamal Khashoggi avaient commis un acte «prémédité». « Les enquêtes se poursuivent », a-t-il ajouté le procureur dans un bref communiqué.
Réaction de la Turquie
« Un meurtre sauvage et planifié… » Tels sont les propos utilisés par le Président turc pour évoquer le meurtre de Jamal Khashoggi, Erdogan a promis de faire toute la lumière sur l’affaire et que l’enquête serait « menée par une délégation juste et impartiale ».
Le Président Erdogan a proposé que les saoudiens responsables du meurtre soient jugés en Turquie plutôt que dans leur pays. Il y en a qui pensent qu’Erdogan utilise l’affaire Khashoggi comme arme politique face à Riyad
« On ne peut pas dire que les éclaircissements d’Erdogan sur le meurtre de Jamal Khashoggi dans l’enceinte du consulat saoudien d’Istanbul, pourtant très attendus, aient particulièrement satisfait notre curiosité. Le Président s’est contenté de résumer les informations qui avaient déjà filtré dans la presse. Cela étant, il fallait que ces choses fussent dites officiellement, par la bouche du plus haut responsable de l’État. Son ton est resté relativement mesuré, ce qui prouve qu’il n’est pas question d’aller à la rupture avec les saoudiens. Erdogan s’est gardé d’interpeller directement le prince héritier Mohammed ben Salman, » analyse-un journaliste turc, Fatih Altayli.
« Cet incident est hideux, » affirme le prince Ben Salman
Mercredi 24 octobre, le prince Ben Salman a qualifié « d’incident hideux » le meurtre du journaliste et opposant Jamal Khashoggi. « L’incident est très douloureux pour tous les saoudiens. C’est hideux et totalement injustifiable. »
S’exprimant devant un forum international d’investissement à Ryad, l’héritier du trône a également affirmé que « la justice prévaudra » dans cette affaire et qu’il n’y aurait « pas de rupture des liens avec la Turquie ». « Beaucoup essayent d’exploiter l’affaire Khashoggi pour créer un antagonisme entre l’Arabie saoudite et la Turquie mais ils ne réussiront pas », a-t-il ajouté.
« Où est le corps ? «
Jeudi, le chef de la diplomatie turque a affirmé qu’il existait toujours « des questions » auxquelles Riyad doit répondre, notamment l’identité des commanditaires et le lieu où se trouve le corps du journaliste assassiné. « 18 personnes ont été arrêtées (en Arabie Saoudite), pourquoi elles ? Qui leur a donné des ordres ? » a interrogé Mevlüt Cavusoglu. « Le corps de Jamal Khashoggi n’a pas encore été retrouvé. Où est-il ? »
Scepticisme sur la scène internationale
Sur la scène internationale, les versions incomplètes ou contradictoires de l’Arabie saoudite sur l’affaire Khashoggi continuent de susciter scepticisme et interrogations. Cette semaine, les Etats-Unis ont annoncé une première mesure de rétorsion : la révocation des visas de 21 suspects saoudiens. Proche allié de Riyad, le Président américain Donald Trump a estimé que l’opération de dissimulation saoudienne, «l’une des pires de l’Histoire», avait été un «fiasco total».
La Grande-Bretagne leur a emboîté le pas en annulant tout éventuel visa détenu par les suspects. De son côté, la France s’est dite prête à des «sanctions internationales» contre «les coupables», «en lien avec ses partenaires».