Mamadou Dia est de ces hommes dont la disparition n’entache en rien le souvenir toujours présent surtout, au Sénégal. Car, il y conserve une place intellectuelle et morale.
Né le 18 juillet 1910 à Khombole au Sénégal, mort le 25 janvier 2009 à Dakar est un homme politique sénégalais qui fut le premier Président du conseil, l’ancienne appellation de son statut de Premier Ministre du Sénégal.
Issu d’une famille toucouleur et sérère, élève à l’École William Ponty (École normale fédérale de l’AOF) et donc instituteur, Mamadou Dia réussit à se faire élire conseiller général dès 1946.
Grand conseiller de l’AOF en 1948, Dia devient ensuite sénateur du Sénégal (1949-1955) puis député, avec Senghor, de l’Assemblée nationale française en 1956 (il siège au sein de l’IOM, les Indépendants d’outre-mer).
Dans cette période fondatrice à maints égards, il sait habilement seconder Senghor (chef du Bloc populaire sénégalais fondé avec lui en 1948) dans les efforts de propagande en direction des minorités non-wolofs, notamment en Casamance ou dans le pays sérère.
Dia constitue avec Senghor, en janvier 1957, à partir du BPS, le Parti de la convention africaine (PCA), premier pas vers une future fédération africaine.
Président du Conseil de Gouvernement du Sénégal issu de la Loi-cadre Defferre (adoptée le 23 juin 1956) puis chef du gouvernement de la République sénégalaise en 1958, Dia hérite de la présidence du Conseil après l’indépendance (septembre 1960).
Spécialiste des questions économiques (il a suivi en France les cours de François Perroux), et met en place le premier plan de développement économique du Sénégal. Il tente aussi d’implanter une administration laïque et moderne, non sans provoquer quelques heurts avec les milieux conservateurs. Alors qu’il incarne au sommet de l’État un système politique bicéphale, la politique économique pour lui, la politique extérieure pour Senghor, les relations de Dia avec le Président s’enveniment peu à peu. Dia milite pour une rupture plus nette avec la France et prépare une sortie planifiée de l’économie arachidière. Cette volonté, exprimée en 1961 dans un ouvrage, heurte les intérêts français.
En décembre 1962, il tente de censurer le gouvernement et de paralyser l’assemblée. Cette accusation de tentative de coup d’État, non « relayée par l’armée » avorte rapidement.
Mamadou Dia est arrêté le lendemain par un détachement de paras-commandos, avec quatre autres ministres, Valdiodio Ndiaye, Ibrahima Sarr, Joseph Mbaye et Alioune Tall. Ils sont traduits devant la Haute Cour de Justice du Sénégal du 9 au 13 mai 1963 ; alors que le procureur général ne requiert aucune peine, il est condamné à la prison à perpétuité tandis que ses quatre compagnons sont condamnés à 20 ans d’emprisonnement ; ils seront détenus au centre spécial de détention de Kédougou. Gracié en mars 1974 puis libéré, il est amnistié en avril 1976, un mois avant le rétablissement du multipartisme au Sénégal.
L’un de ses avocats durant cette période est l’ancien Président Abdoulaye Wade. Il tente alors de revenir sur la scène politique mais le parti qu’il fonda, le Mouvement démocratique populaire, avec comme objectif la mise en place d’un socialisme autogestionnaire ne recueille que peu de soutien.
Peu rancunier, il manifeste une profonde tristesse lors de la mort de Senghor. Ces dernières années il dénonçait avec virulence le libéralisme économique revendiqué par le Président Wade.