C’est l’une des dernières mesures prises par le précédent gouvernement égyptien, remplacé la semaine dernière par le président Abdel Fattah Al-Sissi : l’autorisation d’importer du riz. Une première dans l’histoire de ce pays de tradition rizicole. Mais les autorités du Caire doivent choisir entre cultiver le grain blanc et économiser l’eau du Nil.
L’Egypte va probablement importer 1 million de tonnes de riz cette année, pour la première fois de son histoire, estiment les traders. C’est pourtant un grand pays rizicole, depuis le VIIe siècle. Le Delta du Nil a produit 4,5 millions de tonnes de riz l’an dernier, plus que le Nigéria, deux fois plus que le Laos. Son riz rond japonica nourrissait jusqu’à cette année non seulement la population égyptienne, mais s’exportait dans tout le Moyen-Orient et jusqu’en Europe de l’Est.
Barrage de la Renaissance
Mais depuis l’an dernier, les autorités du Caire ont imposé une réduction des surfaces de rizières de 23% pour économiser l’eau du Nil. Le riz est l’une des cultures les plus gourmandes en eau. Or l’Egypte a déjà un déficit de plus d’un demi-milliard de m3, qu’elle compense en dessalant l’eau de mer ou en retraitant les eaux usées. Et elle va devoir consentir un nouvel effort hydrique d’une quantité équivalente avec la mise en eau du grand barrage hydroélectrique de la Renaissance par son voisin l’Ethiopie, dans la haute vallée du Nil.
Amende contre la riziculture illégale
La production de riz égyptienne est donc en déclin. Même si les riziculteurs égyptiens font de la résistance, parce que le riz est une culture qui rapporte : les rendements en Egypte sont parmi les plus élevés au monde (10 tonnes de riz à l’hectare) grâce un ensoleillement prolongé qui alterne avec des nuits fraîches. Mais les amendes commencent à devenir lourdes, près de 500 dollars par hectare de rizière illégale. Cette année la récolte de riz devrait selon les prévisions (locales et USDA) chuter d’un million de tonnes, c’est un quart de moins que l’an dernier.
Inflation en plein Ramadan
D’ores et déjà les prix du grain blanc montent en flèche sur le marché intérieur. C’est la première raison qui a motivé la décision d’importer du riz : calmer l’inflation en cette période de Ramadan. Mais les importations égyptiennes de riz devraient à moyen et long terme devenir structurelles et grandir, quand le barrage de la Renaissance se sera rempli, au plus tôt dans trois ans comme le souhaitent les autorités d’Addis Abeba, au plus tard dans 10 ans comme l’espèrent les autorités du Caire. Avec un contrecoup fâcheux pour la qualité des sols dans le Delta du Nil, ils se chargent en sel, à mesure que la culture du riz recule.