Un élan de solidarité. Le centre national de transfusion sanguine est en carence de sang, la population a répondu en masse. Des rangs, une longue attente, voilà le décor qui prévaut dans ce lieu. Accéder à l’intérieur n’est pas aisé. Des voix s’élèvent parfois, pour demander une liste, celle gardant les dons de sang par ordre de venue.
Juste à l’entrée, Gnima Coly, accoudée au mur, rempli la fiche de renseignement, obligatoire avant de songer à donner son sang. D’un naturel captivant, la native de Ziguinchor nous confie qu’elle a accouru dès qu’elle a eu vent de l’information. « C’est ma première fois, dit-elle dès l’entame. Lorsque j’ai entendu l’appel, je me suis dite, c’est le moment de tenter l’expérience puisque j’ai toujours voulu le faire mais, réfléchit-elle un instant, l’occasion ne s’était pas encore présentée, » explique-t-elle.
A l’intérieur, au bout du couloir faisant face au bureau de la responsable du service promotion don de sang, nous interceptons dans les rangs Jerry Azilinon du groupe YEEWU, qui veut dire, prendre conscience. « Nous sommes venus, mes collègues et moi, à travers notre association, faire don de notre sang. C’est bon de se rappeler, que personne n’est à l’abri d’un quelconque drame. Et se retourner, pour jeter un regard aux personnes en demande de sang pour s’accrocher à la vie est pour moi quelque chose de fort. La chose anormale est d’entendre cet appel à la survie et de faire la sourde oreille d’autant plus nul ne sait de quoi demain sera fait, » lance-t-il.
Juste en face, se trouve le bureau du chef de service promotion don de sang et activités sociales au CNTS. Le chef, Dankhoumba Traoré Diallo, nous y reçoit. Sa présence, ses manières, le ton de sa voix, tout chez cette femme rappelle la façon d’être d’une mère, son naturel de mettre en confiance ses interlocuteurs. Elle confirme, un état d’urgence. « Après le mois de Ramadan, nous faisons traditionnellement face à un manque de poches sanguins. Et donc actuellement, la banque de sang est en carence de son plus précieux liquide. Mais nous sommes un tant soit peu soulagés. Soulagés parce que les gens viennent en masse. Nous recevons depuis la semaine dernière, plus de 150 donneurs. »
Toutefois, cette situation lève le voile sur une chose. Cette habitude bien de chez nous d’attendre un état d’urgence de ce genre pour réagir. La culture du don de sang devrait être partie intégrante maintenant dans nos vies. Ce que confirme Mme Diallo : « Effectivement, cela pose énormément de soucis. Si les hommes venaient une fois tous les trois mois et une fois tous les quatre mois pour les femmes, ce seraient formidable, » dit-elle. Selon l’OMS, il faut dix donneurs pour mille habitants. Nous au Sénégal, si l’on part du constat selon lequel nous sommes 14 millions d’habitants, il nous faudrait aux alentours de 140 000 à 150 000 dons par an pour couvrir la demande car, elle est assez supérieure à l’offre. Les dernières statistiques dont nous disposons tournent autour de 86 000 dons, » renseigne-t-elle.
Ce qui fait état d’un gap à combler. Le chef de service a également soulevé un autre problème. « Le sang a une date de péremption. Sa validité est de 35 jours. C’est pourquoi, nous avons toujours besoin, d’un renouvellement de stock. »
Tous les groupes sanguins sont les bienvenus. Ceux qui posent le plus de problème, d’après Mme Diallo, sont ceux négatifs.
Au sortir du centre, nous tombons sur une dame, d’âge mûre. Elle repart déçue de ne pouvoir faire don de son sang. « J’ai la soixantaine. Ils m’ont dit que mon âge n’est pas favorable à une donation de sang, dit-elle, la mine chagrinée. Vous êtes déçue ? lui demandons-t-on. « Oui très, » répond-t-elle, parce que je sais qu’ils en ont besoin et cela m’aurait fait énormément plaisir de laisser à qui le veut, un peu de mon sang. »
Sûrement parce que, l’on est plus heureux lorsqu’on donne que quand on reçoit, une vieille maxime.
Ce qui est sûr, toutes les personnes venues des quatre coins de Dakar et ses environs sont animés par une même foi : sauver des vies.