Ils ont fait feu ce matin. A l’image des étudiants des universités du Sénégal, les étudiants de l’ENA, école nationale des arts sont descendus sur la VDN ce lundi 11 mai 2018. Suspension des cours, paiements de bourses, autant de maux les rongeant, et qu’ils ont voulu faire ressortir à travers des manifestations.
La VDN était impénétrable. De 10h 30 à 11h 30, les étudiants promoteurs de la culture ont barré la VDN. Des pierres, jonchant le sol, noirci par le feu provoqué par des pneus brûlés, sont venus s’ajouter au spectacle qu’offre les voitures immobiles, klaxonnant d’impatience. Au niveau du rond-point, stationnent les voitures des gendarmes tentant de décamper la grosse circulation provoquée par la grève des étudiants en rogne.
Dans l’enceinte de l’école où l’on a retrouvé Moussa Faye, leur porte-parole, quelques étudiants présents sur les lieux discutent de vive-voix des événements. D’après le porte-parole, ce n’est pas la fin, mais le commencement. « Nous avons décrété 96h de grèves renouvelables, à compter de ce lundi 11 juin, jusqu’au jeudi 14 juin. Nous voulons la reprise des cours ici à l’école Nationale des Arts dans l’immédiat. Que les professeurs regagnent leurs salles de classe et reprennent les cours qu’ils ont suspendu depuis deux mois, tonne-le porte-parole. A ce rythme, nous allons inévitablement vers une année blanche et nous ne voulons sûrement pas être les agneaux du sacrifice. »
La grève des professeurs dans les écoles ne fait plus l’ombre d’un choc aux yeux des sénégalais. C’est une situation monnaie-courante. A l’ENA, les professeurs réclament des indemnités par rapport à leur statut de formateur au sein de cet établissement. Outre ce fait, ils réclament le paiement des indemnités de leurs surcharges horaires.
C’est au retour des fêtes de Pâques, le 9 avril pour être précis que les étudiants ont été sevrés de cours aussi bien au niveau du supérieur, que du moyen.
« Normalement, renseigne-le porte-parole, à ce jour, les étudiants de la 1ère, 2ème et 3ème année auraient bouclé leurs examens. Et ceux de la quatrième année auraient été en pleins préparatifs pour la présentation de leurs mémoires. Si la situation persiste durant les quinze jours qui viennent, inévitablement, l’année sera invalide à l’ENA, dit-il. »
Hormis celà, les bourses, autre gros problème des étudiants du Sénégal. Pendant deux mois, ceux de l’ENA ne les ont pas perçus. Ce qui explique tout, ou presque.
Pape Djiby Sagna, étudiant en 3e année à l’école des arts affirme que depuis le début de cette situation, eux, les étudiants, ont essayé de jouer une médiation entre les professeurs et le directeur de leur école. Rien de concret n’en est ressorti. Ils ont décidé, de prendre les choses en main.
» Une autre chose nous tient à coeur. La délocalisation de notre école à Diamniadio, sur une surface de quatre hectares, dit-Pape Djiby. Récemment, les autorités l’ont ramené à deux hectares, sans explication plausible. Le directeur du cabinet du ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche nous a reçu pour parler des affaires et problèmes de notre école. A notre grande surprise, il nous fait savoir que cela ne relève pas de ses compétences, confie-Pape Djby. Et, poursuit-il, à la question à savoir si nous sommes concernés par les closes concernant les bourses, il nous rétorque qu’il doit le demander. Comment se fait-il que ceux, censés nous mettre dans des conditions favorisant notre réussite nous donnent l’impression de ne pas bouger le petit doigt en vue de résoudre les difficultés que nous rencontrons, » pose-t-il. Les autorités chargées de la promotion de la culture au sein du gouvernement ne mettent quasiment jamais les pieds ici, » regrette-t-il.
Les étudiants de l’ENA disent avoir besoin d’une rencontre avec le Président Sall. Ce qui les indispose encore plus, c’est la biennale qui a failli se dérouler sans eux. Il a fallu que certains se désistent pour qu’ils soient pris. Le plus grave c’est que les responsables ne les aient pas comptés parmi les exposants de cet événement pourtant « purement artistique et culturel », alors que si tout le monde tournait le dos à la culture aujourd’hui, eux, ne lâcheront jamais, d’après leurs dires.